AVIS DU CCUES

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Le CCUES est informé-consulté sur un Nième projet de réorganisation de GlaxoSmithKline en France.

Le chapitre « Synthèse » du livre 2 indique en page 17 :

  • « …amène le groupe GSK en Europe à définir de nouvelles mesures structurelles afin de sauvegarder la compétitivité de son secteur Médicaments de prescription et vaccins … »
  • « …des objectifs nécessaires à la sauvegarde de la compétitivité de sa branche Pharma … »

Le livre 2 précise 271 suppressions de postes pour 2821 CDI concernés (3442 avec les salariés transférés dans le cadre de la cession de la franchise Thrombose au laboratoire ASPEN). Les sites impactés sont ceux de Marly le Roi (siège et terrain), Evreux et Mayenne.

Afin d’éclairer les membres du CCUES, ce dernier a mandaté le cabinet d’expertise SYNDEX afin d’étudier :

  1. le ou les motifs du projet, et
  2. analyser l’impact sur l’emploi et les mesures sociales.

Le CCUES remercie toute l’équipe du cabinet SYNDEX qui s’est énormément investie dans cette mission.

Pour le motif du projet, à savoir la sauvegarde de la compétitivité, conformément à la jurisprudence de la cour de cassation, ce motif doit s’appréhender tant au niveau GSK France qu’au niveau du Groupe GSK. Dans ce contexte, le cabinet d’expertise SYNDEX a présenté aux élus du CCUES une analyse très complète dont nous reprenons ci-après les principaux éléments :

  • Le marché français du médicament présente des contraintes avérées en particulier avec les impacts des Projets de Loi de Financement de la Sécurité Sociale
  • Mais les perspectives de croissance du marché « hôpital » comblent le recul du marché « ville », même si le cumul de ces deux marchés a baissé de 3% entre 2008 et 2013, ce même cumul va croître de 2.4 % de 2014 à 2017.
  • La vraie contrainte est la pression exercée par les marchés financiers qui exigent plus de dividendes même dans un contexte de marché contraint.
  • Le modèle économique de GSK est basé sur le maximum de rentabilité. Ce modèle se heurte aux besoins des acteurs institutionnels de santé. Par ailleurs, le syndicat patronal de la branche industrie pharmaceutique (LEEM) promeut de maintenir coûte que coûte le profit en déduisant les coûts, principalement les frais de personnel.
  • GSK reste compétitif sur le marché « ville » quand on le compare aux autres sociétés du secteur.
  • Même sans restructuration, GSK France resterait très profitable malgré l’érosion de sa marge brute (de 1% par an).
  • Pourquoi une restructuration impactant fortement les salariés serait-elle nécessaire ? Le taux de profit opérationnel approcherait-il de zéro ? Non, et de très loin, le taux de profit opérationnel baisserait de 38 % à 32% sur les quatre prochaines années. On peut facilement imaginer que beaucoup de sociétés pâliraient d’envie pour de tels taux de profit.
  • Le véritable objectif de cette restructuration est de contribuer à un retour financier aux actionnaires de plus en plus important :
  • Le dividende par action continue d’augmenter, indépendamment du résultat net, alors que le dividende est supposé rémunérer le risque.
  • GSK a le meilleur rendement de l’action par rapport aux autres sociétés du secteur pharmaceutique alors même qu’il offre une des meilleures perspectives de croissances.
  • Les dividendes versés représentent 14% du chiffre d’affaire.
  • La compétitivité au niveau du Groupe GSK est-elle en jeu ?
  • Non, puisque les perspectives de croissance et de taux de profit d’ici 2018 positionnent GSK parmi le top 5 mondial.
  • Non, puisque les analystes prévoient une remontée des ventes à partir de 2015.
  • Non, puisque le taux d’endettement du Groupe GSK est très faible par rapport aux autres sociétés du secteur.
  • Non, car la trésorerie permet d’immense rachat d’actions.
  • Non, car les analystes financiers positionnent le Groupe GSK comme 5ème acteur mondial dans la vente de princeps.
  • Non, car il se situe en 2ème position en terme de « fraîcheur du portefeuille » (part du CA provenant de développements récents)
  • Non car GSK est également en 2ème position en terme de potentiel de CA des nouveaux produits attendus en 2014.
  • Le véritable motif de ce projet est de contribuer à plan mondial d’économies de 1,5 milliard de livres (environ 2 milliards d’euros) visant à limiter l’érosion du niveau de profit exorbitant du Groupe GSK, ce qui n’est jamais mentionné dans le livre II.
  • En revanche, il nous semble exact de dire que les industriels de la pharmacie doivent revoir leur modèle de croissance et leurs pratiques commerciales. De ce point de vue, le qualitatif de la réorganisation proposée par GSK France est, dans ses objectifs généraux, une réponse. Mais le fait de mener simultanément, pour des raisons strictement boursières, une très forte réduction des coûts de frais de personnel, n’est pas nécessaire à la mise en place du nouveau modèle et risque même de fortement pénaliser sa mise en œuvre.
  • L’utilisation de ce nouveau modèle opérationnel, pour créer une nécessité impérieuse de sauvegarde d’une compétitivité qui n’est pas menacée, a pour objectif de justifier un nombre élevé de suppressions de postes pour motif économique, ce qui n’est juridiquement pas valable.
  • Le Groupe GSK a largement communiqué sur un objectif d’économies. Une partie de l’objectif d’économies concerne à l’évidence GSK France. Ce contexte, essentiel à la compréhension du plan, n’est pourtant jamais mentionné dans le livre II. Or, la volonté de réaliser des économies afin de ne pas dégrader un niveau de profit très élevé et la compétitivité boursière n’entrent pas dans la définition des difficultés économiques reconnues par la jurisprudence comme constituant un motif économique valable de licenciement.

Par rapport aux motifs indiqués dans le livre 2, tous ces éléments démontrent que :

  • Le Groupe GSK n’est pas contraint de poursuivre des efforts de réorganisation,
  • La réorganisation envisagée aujourd’hui par GSK France n’a pas de lien avec l’objectif de maintien de compétitivité, mais risque au contraire d’affaiblir (cf en annexe « métaphore de synthèse » du cabinet SYNDEX, envoyé aux membres du comité de direction).
  • La position concurrentielle du Groupe GSK ne se dégrade pas,
  • Le dimensionnement de la cible (le nombre de salariés à licencier) a été effectué pour atteindre les objectifs d’économies définis par le Groupe GSK. Ce dimensionnement n’a pas été validé par des analyses de charge de travail afin de s’assurer du réalisme de l’objectif. Nous avons bien entendu l’engagement pris par la Direction de veiller à ce que la charge de travail des salariés qui resteront dans la nouvelle organisation soit compatible avec ce qu’ils peuvent absorber, et nous vérifierons que cet engagement soit tenu. Il n’en demeure pas moins, que dans plusieurs cas, les échanges entre nous-mêmes (CCUES, CE et CHSCT), nos experts et la Direction ont clairement démontré que la cible était sous-dimensionnée et que pour encore beaucoup de cas, même devant des démonstrations rigoureuses et l’évidence, la Direction a refusé de revoir sa position, ce que nous regrettons vivement.
  • L’ampleur des suppressions de postes n’est pas justifiée, elle est même risquée, en faisant porter sur les salariés une charge de travail excessive.

Pour le deuxième thème d’étude confié au cabinet SYNDEX à savoir l’analyse d’impact sur l’emploi et les mesures sociales :

  • Nous actons ici que, suite aux réunions du CCUES et des négociations avec les Organisations Syndicales,
  • 20 postes initialement supprimés sont maintenus pérennes dans l’organisation:
  • A la Direction des Opérations : 2 DIR ville, 1 assistante, 9 APM
  • A la Direction COMEO : 1 coordinateur de formation devenant responsable de formation
  • A la Direction Médicale : 1 responsable données, 2 chefs de projet médical (un en oncologie et un en respiratoire), 1 assistante
  • A la Direction DAEG : 1 poste RRPI Métropole
  • A la Direction ICSS : 1 poste basé à Evreux reprenant entre autres les activités « gestion des cartes AMEX »
  • A la Direction DAP : 1 chargé de gamme, sous réserve d’un maintien de l’activité, ce point sera contrôlé par la commission GPEC.
  • A la Direction Finance GMS Evreux : 1 poste à définir
  • et 3 postes sont créés à la Direction COMEO :
  • 1 responsable partenariat SGP/Pharma,
  • 2 postes ADVM
  • Le CCUES s’étonne de la structuration et de la pondération de vos critères d’ordre car vos critères présentent une particularité qui pourrait intéresser le juge du fond à savoir le poids relatif entre la partie des critères sociaux (chargé de famille, âge, ancienneté, handicap,…) et la partie professionnelle. Effectivement les critères sociaux pèsent pour 1/3 et les critères professionnels pour 2/3.
  • Le CCUES s’étonne de la structuration de vos catégories professionnelles au nombre de 124 dans le livre I qui a été communiqué au CCUES en ouverture de la consultation, puis 105 en fin de consultation. La différence entre 124 et 105 n’a que peu d’effet dans l’application de vos critères d’ordre, le CCUES n’est pas dupe. Une Direction voulant désigner de façon nominative ses suppressions de poste ne s’y serait pas prise autrement.
  • Même si la négociation avec les Organisations Syndicales se basait, à la demande de la Direction, sur l’échange de ses critères d’ordre et de ses catégories professionnelles contre des mesures du PSE, le principe reste très surprenant pour une entreprise qui communique largement sur sa Responsabilité Sociétale.

D’un point de vue global :

  • Comme le démontre le rapport du cabinet d’expertise SYNDEX, et malgré toutes les explications développées par la Direction, ne sont justifiés ni le motif de sauvegarde de la compétitivité, ni un motif économique, ni le motif de maintien de la position concurrentielle.
  • Comme le démontre le rapport du cabinet d’expertise SYNDEX, l’objectif premier du projet est la défense du taux de profit du Groupe GSK afin de renforcer la rémunération des actionnaires. A cette fin, le groupe aura successivement supprimé en France 200, puis 370, puis 850, puis 500, puis 270 postes, soient au total pas moins de 2190 postes supprimés sur ces dernières années.
  • Avec des marges largement positives qui demeurent sans comparaison avec la plupart des autres sociétés (pharmaceutiques ou non), et encore moins avec la plupart des autres sociétés qui procèdent à des plans de réduction d’emploi, qu'en est-il de la responsabilité sociétale de GSK ?
  • Ce sont les décisions du Groupe GSK et sa politique financière qui entraînent des ajustements, toujours sur la même variable : les salariés.

Dans ce contexte, l’avis du CCUES sur ce projet de réorganisation est défavorable à l’unanimité.

Annexe :

Annexe : « Métaphore de Synthèse » proposée par le Cabinet Syndex

« La situation est la suivante : GSK France s'apprête à partir :

avec un prototype de moteur radicalement nouveau (nouvelle approche réseaux)

avec, début 2015, un prototype de nouveau carburant principal (abandon des primes au CA),

avec une réduction des carburants secondaires de l'ancienne génération (congrès, etc.) ET des carburants secondaires de nouvelle génération (RRPI, notamment )

avec un objectif qui ne peut être atteint qu'en tournant à 100-105% de la capacité tout au long du voyage

et avec de multiples points de surchauffe clairement identifiés (secteurs sous-staffés)

Le tout en réduisant un nombre de mécanos (les supports) déjà fortement contraint

Est-ce bien raisonnable ? »

Consulté sur le « projet d’accord à l’issue de la négociation portant sur les mesures et la mise en œuvre du Plan de Sauvegarde de l’Emploi »,

  • le CCUES déplore que seulement quelques propositions d’emplois à sauver aient été prises en compte par la Direction, parmi l’ensemble des propositions étayées par les membres du CCUES et par le cabinet d’expertise SYNDEX. Ces propositions visaient, non seulement, à la sauvegarde de l’emploi mais aussi de préserver les conditions de travail des salariés restant dans l’organisation de GSK France. Ces propositions veillaient aussi à la préservation de la compétitivité face aux profondes mutations du secteur, en dotant l’organisation des marges de manœuvres nécessaires pour s’assurer de la réussite du projet.
  • Le CCUES constate que, pour certains postes, la Direction de GSK France n’ait pas le pouvoir de décision afin de répondre à ses demandes fondées et étayées de maintien de ces postes. Le décideur étant en Angleterre, les élus du CCUES et les Organisations Syndicales n’ont pas pu négocier, ce qui est contraire aux directives européennes en la matière.
  • Pour les conditions de travail, le rapport d’expertise mandaté par les CHSCT de l’UES GSK de Marly-Les Ulis de GSK Mayenne et de l’UES GSK Evreux démontrent :
  • Un accroissement du risque routier par l’augmentation de la taille des secteurs géographiques.
  • Une augmentation du temps de travail en raison de la diminution des effectifs du siège et de l’augmentation des secteurs d’intervention des délégués médicaux.
  • Une augmentation de la charge de travail des salariés restant dans les organisations GSK des sites impactés.
  • Ces éléments de conditions de travail démontrent que les demandes d’effectifs supplémentaires sont fondées et le resteront.
  • Le CCUES déplore que le projet initial du PSE déposé par la Direction à l’information-consultation de la présente instance ait présenté un budget, pour les mesures de reclassement, d’environ 60% de celui du plan précédent. Par ce fait la Direction a pris un risque énorme pour la consultation, les négociations et les réactions de la collectivité de travail.
  • Le CCUES note qu’en cours de négociation, la Direction sous la pression des Organisations Syndicales ait enfin pris la décision de mettre en place un budget équivalent à celui du dernier plan (2010). Le contexte économique en France rendant le retour à l’emploi beaucoup plus difficile aujourd’hui que lors du dernier plan.

La Direction aurait dû proposer d’emblée un niveau de mesures globalement supérieur au PSE 2010, ce qui aurait été une réelle Responsabilité Sociétale. Ceci est très différent de ce que la Direction communique sur le plan institutionnel.

  • Le CCUES s’étonne de la structuration et de la pondération de vos critères d’ordre car vos critères présentent une particularité qui pourrait intéresser le juge du fond à savoir le poids relatif entre la partie des critères sociaux (chargé de famille, âge, ancienneté, handicap,…) et la partie professionnelle. Effectivement les critères sociaux pèsent pour 1/3 et les critères professionnels pour 2/3.
  • Le CCUES s’étonne de la structuration de vos catégories professionnelles au nombre de 124 dans le livre I qui a été communiqué au CCUES en ouverture de la consultation, puis 105 en fin de consultation. La différence entre 124 et 105 n’a que peu d’effet dans l’application de vos critères d’ordre, le CCUES n’est pas dupe. Une Direction voulant désigner de façon nominative ses suppressions de poste ne s’y serait pas prise autrement.
  • A la demande de la Direction, la négociation avec les Organisations Syndicales s’est basée sur l’acceptation des critères d’ordre et des catégories professionnelles du projet contre l’amélioration des mesures du PSE. Cela démontre la volonté farouche de la Direction de pouvoir choisir qui partira. En conséquence, la Direction est seule responsable de la mise sur le marché du travail voire au chômage des collaborateurs les plus fragilisés. En minorant fortement les critères dits « sociaux » (chargé de famille, âge, ancienneté, handicap,…), la Direction, une fois encore, est éloignée des valeurs qu’elle promeut en termes de Responsabilité Sociétale.
  • Le CCUES demande que les critères sociaux entrent en jeu lors des reclassements internes.
  • Le CCUES note qu’au cours des négociations a été crée une Instance Spécifique ayant entre autre un rôle de cogestions du budget alloué au PSE. Le CCUES espère que cet engagement se traduira par une réelle mise en œuvre. L’avenir éclairera les salariés sur la compréhension du mot cogestion puisque la Direction n’a jamais parlé de gestion paritaire.
  • Le CCUES acte que la Direction finance son expert et auditeur SYNDEX pour aider l’Instance Spécifique sans être limitatif dans ses rôles de contrôle et de pilotage du budget du PSE.
  • Le CCUES sera à l’écoute des travaux de l’Instance Spécifique et de la Commission de Suivi.
  • Le CCUES doit porter un regard global sur ce PSE construit et négocié, en échange des catégories professionnelles et des critères d’ordre de la Direction. La question essentielle est de savoir si les mesures de ce PSE permettront :
  • Une réelle accessibilité à la CAA car cette mesure permet de limiter les licenciements contraints. Le point faible reste la conception de la Direction sur la substitution. Le CCUES est conscient que les règles de substitution se heurteront directement aux besoins opérationnels de l’entreprise. Le CCUES veillera à l’application des règles énoncées.
  • A tous les salariés impactés de retrouver une solution professionnelle durable.
  • De consommer intégralement le budget prévisionnel à travers le contrôle et le pilotage par l’instance Spécifique.
  • Le CCUES peut aussi regarder ce projet d’accord sous trois axes :
  • un axe du risque de contentieux concernant uniquement la Direction,
  • un axe de gestion du risque des IRP et des Organisations Syndicales quant à l’équilibre des mesures versus l’échange avec les critères d’ordre et les catégories professionnelles de la Direction,
  • le risque de validation-homologation par la DIRECCTE.

Pour le troisième axe, la DIRECCTE pourra lire que le CCUES est d’accord pour la validation du « projet d’accord à l’issue de la négociation portant sur les mesures et la mise en œuvre du Plan de Sauvegarde de l’Emploi ».

Ceci est l’avis du CCUES sur le « projet d’accord à l’issue de la négociation portant sur les mesures et la mise en œuvre du Plan de Sauvegarde de l’Emploi ».

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